Antonio Negri et Michael Hardt

Si vous pensez que
« la prochaine grève sera la grève sur Internet »
et que seule la multitude peut s’opposer à l’empire du capitalisme,
c’est que vous êtes un négriste qui s’ignore. Figure de la pensée
altermondialiste, le philosophe italien Toni Negri est célèbre pour son
ouvrage
Empire, coécrit avec l’universitaire américain Michael Hardt.
Best-seller international de la contestation,
Empire
décrit l’extension du capitalisme à l’échelle de la planète comme
l’instauration d’un système de domination totale, à la fois juridique,
politique, militaire et culturelle. Forme suprême de domination
internationalisée, l’empire aurait pris l’ascendant sur les
États-nations les plus puissants et se déploierait en un vaste réseau
mondial très mobile. S’enracinant dans toutes les régions du monde,
toutes les activités sociales, l’empire contrôle aussi,
via la
biopolitique, tous les aspects de la vie. Omnivore, il ne permettrait
plus l’existence d’un « extérieur » à lui-même. Sa principale
caractéristique est le travail immatériel, c’est-à-dire
« une forme
de travail qui crée des produits immatériels, tels que du savoir, de
l’information, de la communication, des relations ». Mais si aucune
alternative n’est possible en dehors de l’empire, de nouvelles formes
peuvent, en revanche, émerger en son sein. Cette alternative est la
multitude. Considérée comme un ensemble d’individualités, la multitude
exprime les désirs, les luttes et les résistances des hommes à
l’intérieur de l’empire. Elle est un pouvoir émancipateur, se
confrontant aux pouvoirs institués sous la forme d’une effervescence
subjective et créatrice. Pour Negri et Hardt, seules la multitude et ses
formes variées de résistances pourront s’opposer à la logique de
l’empire. Mais la question de la diversité humaine se pose alors. Les
forces de résistances étant éclatées, la stratégie de la multitude ne
risque-t-elle pas de sombrer dans le piège d’une dispersion de la
contestation ? Pour les deux auteurs, la multitude échappe à cet écueil
car elle est faite
« de singularités agissant en commun ». En
effet, s’ils mettent en avant la diversité, ils gardent une vision très
unifiée de la société existante parce que soumise à un ordre capitaliste
homogène. Prétendant poser les bases d’un postmarxisme proche de Gilles
Deleuze et Michel Foucault, les thèses de Negri sont aujourd’hui
particulièrement discutées en France et notamment dans la revue inspirée
de ses travaux :
Multitudes.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire