Au ralenti, une autre réalité apparaît à nos yeux
éblouis par la tension que génère une finale olympique du 100 m. On
n'avait pas vu hier soir la bouteille de bière, lancée par un
spectateur, tomber sur la piste à quelques mètres des huit finalistes, entre le commandement "prêt" du starter et le coup de feu du départ. Pas plus que le lacet gauche d'Usain Bolt se dénouer lors de la précédente finale, il y a quatre ans à Pékin.
Les films à grande vitesse, qui se déroulent plus lentement, offrent surtout une autre vision du scénario des courses. La prise de vue horizontale en balayage depuis la ligne d'arrivée des retransmissions télé à vitesse réelle donne toujours l'impression que les coureurs alignés dans les couloirs extérieurs partent moins bien et finissent plus vite que leurs concurrents. Alors que ces effets de parallaxe font croire que le tenant du titre (au couloir 7) s'est envolé dans la dernière moitié de course, les documents enregistrés à différents endroits des tribunes du stade de Londres montrent qu'hier soir, la victoire était jouée dès le début.
Les films à grande vitesse, qui se déroulent plus lentement, offrent surtout une autre vision du scénario des courses. La prise de vue horizontale en balayage depuis la ligne d'arrivée des retransmissions télé à vitesse réelle donne toujours l'impression que les coureurs alignés dans les couloirs extérieurs partent moins bien et finissent plus vite que leurs concurrents. Alors que ces effets de parallaxe font croire que le tenant du titre (au couloir 7) s'est envolé dans la dernière moitié de course, les documents enregistrés à différents endroits des tribunes du stade de Londres montrent qu'hier soir, la victoire était jouée dès le début.
UNE VITESSE MAXIMALE DE 12,3 M/S
Le temps de réaction de Bolt, 0 s 165 est seulement le 5e
meilleur de la finale. Mais, coïncidence, le champion olympique avait
réagi à l'identique il y a quatre ans lors de son premier titre.
C'est aussi tout proche de sa moyenne de 2012 (0 s 163), qui est la
meilleure de sa carrière. On constate qu'il est sur ce point en
constante progression depuis Pékin. Le crâne de Bolt pointe légèrement
devant les autres finalistes au moment où ils posent leur premier appui
sur la piste. Le champion olympique de 2004 Justin Gatlin est le seul à
lui tenir tête pendant 2 s de course avant de céder face à la foudroyante accélération que le Jamaïcain est capable de maintenir
pendant 7 s.

Aux 60 m, Bolt possède une avance de 0 m 57 sur Gatlin et,
déployant des foulées de 2 m 78 pour une vitesse de pointe atteignant
les 12,3 m/sec, tout proche de ce qu'il avait réalisé lors de son record
du monde à Berlin (9 s 58) il y a trois ans.
BOLT, L'ÉCLAIR SILENCIEUX
Le phénomène Usain Bolt est donc revenu à son meilleur niveau. Celui
du plus grand sprinteur de l'histoire. Par sa morphologie, c'est
indéniable : 1 m 96 pour 95 kg. Mais cela n'a pas suffit à faire
de lui le plus rapide. La vitesse de course est le résultat d'un
équilibre unique entre la rapidité, l'amplitude, l'intensité, la
précision, la constance et la fluidité de ses mouvements. Il y a autant
de combinaisons que de sprinteurs possibles, et les meilleurs sont ceux
qui réussissent à apprivoiser les particularités de leur physique.
Ce qu'a fait l'homme le plus rapide du monde, composant avec une jambe
droite plus courte que la gauche et une scoliose (déformation dans les
trois plans de l'espace de sa colonne vertébrale).
Bolt tourne ses jambes un peu plus lentement que les autres mais il
compense en déployant la foulée la plus longue. Cela lui permet d'avoir le temps de replacer ses longs segments, les accélérer et frapper
de son pied le sol en générant des forces supérieures à ses rivaux. La
différence de temps d'appui entre ses pieds ne nuit pas au rythme de ses
foulées, tant qu'elle est stable et que le mouvement s'effectue dans le
relâchement. Ce qu'il soulève en salle de musculation (105 kg en
développé couché, 125 kg en squat) – autant que certaines sprinteuses –
ne dit rien de sa force. Il faut chercher au cœur de son système neuromusculaire pour trouver la clé du sprint.
En physiologie, les électromyographies enregistrent le "bruit", c'est à dire la contraction musculaire et le "silence", son relâchement. Chaque coureur possède son propre rythme de bruits et de silences, les sprinteurs étant ceux qui peuvent contracter
leurs muscles très vite et très fort, et les meilleurs d'entre eux se
distinguent par leur faculté de les relâcher plus longtemps. Silencieux,
à l'image de Bolt, capable de rester en suspension pendant 60 % lorsqu'il atteint sa vitesse de course maximale, donnant l'illusion de se mouvoir au ralenti.
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