Par R. Besse Desmoulières, issu du blog "Gauche Toujours", 07 Juilet 2012.
Où s'arrêtera la chute ? Trois ans après sa fondation, le Nouveau
Parti anticapitaliste (NPA), qui ambitionnait de devenir un parti de
masse, s'enfonce chaque jour un peu plus dans la crise. Samedi 7 et
dimanche 8 juillet, lors d'une conférence nationale, le parti d'Olivier
Besancenot devrait tourner une nouvelle page de son histoire avec une
énième vague de départs.
Très critique envers la direction qualifiée de "sectaire",
le courant de la Gauche anticapitaliste (GA) - qui représentait 40 % au
congrès de juin 2011 - devrait officialiser ce week-end son départ pour
le Front de gauche. "A force de louper le train de l'unité, de ne
pas tirer le bilan des échecs, le NPA va droit vers une certaine
marginalisation. C'est assez triste", juge Pierre-François Grond,
l'ancien bras droit d'Olivier Besancenot qui a quitté le parti voilà
déjà quelques semaines après y avoir milité plus de 28 ans.
"On n'est pas une armée de petits soldats"
Au final, c'est une génération de cadres, souvent quarantenaires, qui s'en va. "Des gens formés",
reconnaît Alain Krivine. Cette figure historique de la Ligue communiste
révolutionnaire (LCR), ancêtre du NPA, tente cependant de minimiser la
situation, estimant que seuls "150 militants" seront concernés. La GA parle elle de "plusieurs centaines" de départs ; beaucoup ayant déjà franchi le pas. "Ce n'est pas une surprise : c'est une crise qui existait depuis des mois, juge de son côté Olivier Besancenot, qui se veut "pragmatique". Il faut laisser les militants faire leur expérience : on n'est pas une armée de petits soldats."
Qu'il semble loin le temps de l'enthousiasme qui avait entouré la
création du NPA, un parti qui a revendiqué jusqu'à 9 000 adhérents.
Aujourd'hui, il n'en compte plus que 3 à 4 000 selon la direction. Plus
ou moins les effectifs de la LCR. "C'est un retour à la case départ, juge Vincent Tiberj, chercheur à Sciences Po. C'est assez terrible : une sanction politique, financière et symbolique. Tout le problème est de réussir à rebondir..."
Rebondir après les 1,15 % à la présidentielle et 0,98 % aux
législatives (comptabilisés avec Lutte ouvrière), qui ne pèsent pas
lourds face aux 11,1% de Jean-Luc Mélenchon. "Les gens ne votent pas Poutou ou Besancenot, analyse Alain Krivine. Il y a une dichotomie totale entre la sympathie que l'on nous porte et la crédibilité électorale qui n'existe pas." Reste qu'Olivier Besancenot avait réussi en 2002, comme en 2007, à réunir plus de 4% des voix.
"Séquence catastrophique"
Pour Vincent Tiberj, "l'extrême-gauche est en train de passer d'une ère à une autre". "La crise du NPA est créée par ses revers électoraux mais il fut un temps où ces derniers n'étaient pas un enjeu, explique-t-il. Aujourd'hui,
l'extrême-gauche a intégré le jeu électoral, ce qui pose un problème au
NPA qui, contrairement à Lutte ouvrière, avait pour ambition de créer
une alternative." Conséquence de ces résultats : le NPA a perdu son
financement électoral, soit 900 000 euros en 2007. De l'argent, assure
la direction, qui ne servait pas au fonctionnement du parti mais
réservés au financement des campagnes électorales.
Cette séquence est jugée "catastrophique" par Ingrid Hayes, porte-parole de la Gauche anticapitaliste. C'est une "étape difficile" pour Christine Poupin, porte-parole du NPA. "Il ne faut pas en conclure qu'il faut renoncer à construire un large parti anticapitaliste",
ajoute Mme Poupin. Le bilan sera tiré, assure-t-elle, lors d'un congrès
qui devrait se tenir d'ici à la fin de l'année. Mais pour Danièle
Obono, qui a quitté le NPA début 2011 pour le Front de gauche, "c'est la confirmation de notre diagnostic" : "Ce qui reste au NPA en terme de pluralisme, de débat, c'est moins qu'à la LCR", attaque-t-elle.
"Les copains vont se faire bouffer"
La Gauche anticapitaliste est aujourd'hui en discussions avec
plusieurs petits courants du Front de gauche pour tenter de créer un "troisième pôle" face au Parti communiste et au Parti de gauche. L'objectif : "peser davantage qu'un confetti." "Les copains vont se faire bouffer et ils le savent",
riposte Alain Krivine, qui se montre très critique envers le Front de
gauche. Principal reproche : s'être abstenu lors du vote de confiance au
gouvernement à l'Assemblée nationale. Un avis partagé par Christine
Poupin. "Quand on est face à une politique d'austérité, on ne se contente pas de s'abstenir, juge-t-elle. Ce n'est pas suffisant !"
Le NPA compte maintenant sur une mobilisation sociale forte pour se refaire une santé. "En ce moment, il y a un peu la grève de la grève mais la situation reste explosive",
veut croire Alain Krivine. Vincent Tiberj souligne de son côté qu'il
est moins facile de se mobiliser sous un gouvernement de gauche. "Les relais traditionnels du mouvement social sont plus ou moins paralysés par la gauche au pouvoir",
explique le chercheur. Et quand bien même, la tâche ne sera pas si
aisée. Une fois de plus, le NPA retrouvera sur son chemin le Front de
gauche qui compte bien, lui aussi, être aux côtés des manifestants.
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