lundi 9 février 2009

Naufrage

Guidé par l'essence du vide, la faim nous tenaillait. A chaque avancée des crampes d'estomac se faisaient plus durement ressentir. Aucun horizon, aucune échéance à ce malheureux impossible. Dans le vent, la fraîcheur de l'hiver devait nous ramener vers le nord. Mais nous naviguions sous un brouillard épais dans l'ignorance et la crainte d'un espoir insondable, noir. Une prière montait sur toutes les lèvres. A chaque vague du fleuve grondait un océan, notre sort jeté sous les lames et le creux des voilures ainsi que le front des mâts tout prêts à céder. Un homme d'une seule voix se fit entendre pami l'équipage : "Amour, ne vois-tu rien venir ?" La lune rivait parfois sur nous son oeil d'une auguste clareté, faisant naître par endroits l'ombre des récifs, l'illusion d'une rive. "Allez, semblait-elle indiquer, vous autres, hommes, qui bientôt mourrez". "Allez à tous les parfums, ce soir il n'y aura plus d'étoiles".

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